« La main est bien plus intelligente ! Lorsque nous écrivons, nous pré-digérons l’information, car nous ne sommes pas assez rapides pour suivre le rythme de la parole de notre interlocuteur », explique le spécialiste. « Comme cela nous demande beaucoup d’efforts, nous sommes obligés de sélectionner les infos, de les synthétiser et de les organiser. » En économisant de l’énergie, nos neurones nous simplifient le travail. Par ailleurs, « dans un document papier, nous organisons les éléments de manière graphique, avec des connexions entre les éléments comme des flèches par exemple », continue-t-il. Chose difficile sur un document virtuel. « Cette hiérarchisation est un premier pas dans le processus de compréhension et de mémorisation. »
Le clavier, une écriture « bête »
Dès 2014, les chercheurs américains Pam A. Mueller et Daniel M. Oppenheimer avaient alerté sur les effets contre-productifs des écrans dans le processus d’apprentissage : « L’utilisation d’ordinateurs en classe doit être examinée avec une salutaire dose de prudence. En dépit de leur popularité croissante en ces lieux, les ordinateurs pourraient faire plus de mal que de bien », écrivaient-ils dans la revue scientifique Psychological Science en 2014 (« The Pen Is Mightier Than the Keyboard : Advantages of Longhand Over Laptop Note-taking » ).
Les chercheurs étaient arrivés à cette conclusion après plusieurs expériences. Dans l’une d’entre elles, des étudiants, divisés en deux groupes, devaient prendre un cours en notes. Les premiers au clavier, les seconds avec un stylo. Les premiers avaient certes pris beaucoup plus de notes, car ils étaient plus rapides pour écrire. Mais les seconds avaient obtenu de meilleurs résultats à l’examen.
Pour Jean-Luc Velay, l’explication est simple : « Nous écrivons plus vite avec un clavier, mais plus mécaniquement et sans réfléchir ! Nous nous comportons comme un enregistreur. » A l’inverse, l’écriture implique un lien intime entre le mouvement et l’apprentissage. « Nous avons fait passer des IRM à des sujets adultes auxquels nous avons montré des images de lettres. Bien qu’ils étaient immobiles, des zones du cerveau liées au mouvement s’animaient : celles de l’écriture. Nous nous sommes rendu compte que la simple visualisation de lettres réactive la mémoire du mouvement. » En bref, vos mains font marcher vos yeux et votre cerveau.