Draguer à l’ère de l’IA, ça donne quoi ?

Pour ceux qui cherchent l’amour, le vrai, l'algorithme des applis de rencontre n’est pas toujours tendre. Alors certains utilisateurs de ces plateformes n'hésitent pas à user de l'intelligence artificielle pour faciliter la drague en ligne. Mais cette technologie peut aussi se retourner contre eux en les considérant comme faux profils. Explications.

©Getty

Temps de lecture : 4 minutes

Si ChatGPT peut rédiger une lettre de motivation, il peut tout aussi bien écrire une déclaration enflammée à l’élu(e) de votre cœur. Attention néanmoins aux faux profils : ces escroqueries sentimentales peuvent coûter cher. Heureusement, l’IA intégrée aux applications de rencontres joue aussi un rôle protecteur, en détectant et bloquant les relous. 

Beaux parleurs… signés ChatGPT

En scrollant sur TikTok vous pourrez découvrir nombre de témoignages ou de tutos vous expliquant comment utiliser ChatGPT sur les applications de rencontre. Paresse intellectuelle pour certains, gain de temps pour d’autres, l’utilisation de ChatGPT à des fins relationnelles fait jaser dans les commentaires. 

Si certains utilisateurs se contentent de demander à l’IA de leur écrire une biographie personnalisée, d’autres vont carrément jusqu’à scripter des conversations entières. “Intéressant et utile” ou “complètement malaisant”, ChatGPT s’est bel et bien imposé sur les applications de rencontres, comme l’explique, dans cette vidéo (ci-dessous), Chloé Sondervorst, journaliste spécialiste des cultures numériques pour CBC/Radio-Canada.

D’autres utilisateurs vont encore plus loin en demandant à ChatGPT de générer des “profils parfaits” pour réussir à percer plus facilement la glace avec un partenaire potentiel, voire de générer des phrases d’accroche en lui donnant le profil exact de la personne à conquérir. 

Bien pratique pour tous ceux qui, par maladresse ou par timidité, se retrouvent mis sur le banc de touche de la drague. On peut cependant se demander ce que cela signifie pour la personne qui reçoit ces missives. Des notions comme le consentement, la confiance ou la sécurité ne semblent pas être au cœur des préoccupations des utilisateurs de l’IA à des fins de séduction. C’est notamment le cas des créateurs de Cupidbot.

CupidBot, l’IA qui piège les femmes sur Tinder 

Pour 14€ par mois, vous pouviez multiplier les matchs sur les applis de dating avec un robot automatisé qui draguait à votre place. Pensée pour “les hommes hétéros moyens” (SIC), cette application automatisait les interactions sur les plateformes de rencontre en ligne en utilisant l'intelligence artificielle. Elle se chargeait de "swiper" et de converser avec les autres utilisateurs en votre nom, dans le but de planifier des rendez-vous sans que vous ayiez à intervenir. L'IA analysait vos préférences pour sélectionner des profils correspondant à vos goûts et engageait des conversations adaptées pour organiser des rencontres.

Interrogé par Motherboard pour vice.com, le porte-parole de l’application estimait que “les hommes cis-hétéros moyens sont désavantagés sur les sites de rencontre et en souffrent davantage.” Si cette méthode a pu mener au happy ending, la notion de consentement n’était pas vraiment respectée puisque les femmes n’avaient aucune idée qu’elles n'interagissaient pas avec une vraie personne. Par ailleurs, ce type d’application, destiné à engranger un maximum de matchs (un peu comme on collectionne des Pokémon), peut les mettre en danger en cachant d’autant mieux les prédateurs potentiels.

Si le site officiel de CupidBot est toujours accessible, l’application semble avoir été retirée des magasins de téléchargement d’applications. En mars 2024, Match Group, la société mère de Tinder, a intenté une action en justice contre les développeurs de CupidBot.

La riposte : des filtres à relous

Si l’IA crée de nouvelles opportunités pour la fraude, affectant la capacité des Français à faire confiance à des partenaires potentiels sur les applications de rencontre, elle permet néanmoins d’identifier efficacement les faux profils. Ces comptes falsifiés utilisent des photos piochées en ligne, derrière lesquelles se cachent des arnaqueurs abusant de la faiblesse de certaines victimes. 

Bumble a donc lancé Deception Detector, un outil basé sur une intelligence artificielle pour évaluer l'authenticité des profils. Les tests effectués en interne auraient permis de supprimer automatiquement 95% de comptes déjà identifiés comme des faux. 

Sur Tinder aussi, l’IA aussi joue les modérateurs. En cas de non-respect des règles de bienséance élémentaires, les utilisateurs reçoivent un message d’avertissement sur leur comportement inapproprié, pouvant conduire à une exclusion temporaire. Sur Happn, c’est un nombre de likes démesurément élevé qui attire l’attention de l’IA, explique aux Echos Karima Ben Abdelmalek, présidente et dirigeante de l'application. 65% des comptes suspects ont déjà été suspendus grâce à l’intelligence artificielle.

Seriez-vous prêt à troquer votre psy pour une IA ?

Lire l’article

Rencontrer quelqu’un via des applications n’est pas naturel, alors pourquoi ne pas demander un coup de pouce à l’IA ? Toutefois, les personnes qui l’utilisent dans leur vie amoureuse risquent d'être plus dépendantes de la technologie et de voir leur pouvoir personnel diminuer. Qu’en sera-t-il, une fois hors ligne, de la capacité à s'engager dans des conversations spontanées et établir des liens authentiques ?

Partager l’article

Partager sur