Sommeil, adolescence, écrans : conseils d’expert pour les lever du bon pied 

Les adolescents traînent une réputation de dormeurs en difficulté. Mais faut-il vraiment tout mettre sur le dos des téléphones ? Pas si simple puisque les courbes de leur sommeil diminuent depuis les années 1990. Sylvie Royant-Parola, psychiatre spécialisée dans les troubles du sommeil, nous livre ses conseils pour que nos jeunes se réveillent en pleine forme, dès la rentrée.

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Temps de lecture : 4 minutes

Question piège : savez-vous combien d’heures de sommeil sont nécessaires à un enfant de 5 ans, de 10 ans ou de 16 ans ? La plupart d’entre nous, même parents, ont du mal à répondre. Et pour cause : le sommeil n’a pas encore trouvé sa place dans nos politiques de santé et de parentalité. Le sujet émerge cependant. Le gouvernement vient ainsi de publier 25 recommandations pour lutter contre ce déficit chronique, mais le sommeil reste encore trop souvent relégué au second plan face à la nutrition ou à l’activité physique.

Selon un rapport officiel, 30 % des enfants et 70 % des adolescents souffrent pourtant d’un manque de sommeil, les recommandations étant à cinq ans, de 10 à 13 heures. A dix ans, de 9 à 12 heures et à 16 ans, de 8 à 10 heures. Des chiffres qui donnent à réfléchir.

30 % des enfants et 70 % des adolescents souffrent d’un manque de sommeil

La faute à une société pour adultes sans enfant ?

Le déficit, en grande partie, est le reflet d’une société qui impose son rythme aux plus jeunes. Rythme scolaire intensifié, devoirs en pagaille, repas tardifs, et parents débordés qui jonglent entre boulot, temps de transport et vie de famille. Ajoutez à cela des activités extrascolaires souvent tardives, et vous obtenez un cocktail détonant pour le sommeil. Les parents, eux aussi, dans ce rythme infernal sont souvent stressés et en manque de sommeil (nos conseils pour vous, les adultes), ce qui complique la prise de conscience de l’impact de ces décalages. Et quand bien même, ils s’en aperçoivent, pas facile de mettre en œuvre des solutions.

Le rythme spécifique de l’adolescent

À l’adolescence, le problème s'accroît pour cause d’horloge interne modifiée. La structure du sommeil se modifie : le sommeil léger devient plus fréquent, le sommeil profond, essentiel pour la récupération, diminue. La puberté, avec ses montagnes russes hormonales, joue un rôle clé. Sylvie Royant-Parola explique que l’horloge biologique de l’adolescent se décale, avec une sécrétion de mélatonine (l’hormone du sommeil) qui se produit plus tard dans la nuit. Pas facile pour les adolescents programmés pour s’endormir après 23 heures d’être en pleine forme tôt le matin à l’école car l’adolescent a des besoins de sommeil importants : neuf heures en moyenne permettent à l’adolescent de 14 à 17 ans d’être en forme. En dessous de huit heures, l’adolescent est bien souvent en déficit de sommeil. Certains collèges s’adaptent, ne programment plus de cours à 8 heures pour les 4èmes et 3èmes et les résultats scolaires s’améliorent. 

La part des écrans

Bien avant les téléphones mobiles, les écrans jouaient un rôle dans le mauvais sommeil des Français. Cet écran s’appelait…une télévision. Combien d'adultes se plaignaient d’avoir regardé la télévision trop tard, voire de s’être endormis devant ? Les adolescents, envoyés dans leur chambre eux (s’ils n’y avaient pas de télévision), se contentaient d’un livre. Désormais, les téléphones sont au creux de leur main et les suivent dans leur chambre. Ils perturbent pourtant  l’endormissement, la qualité et la quantité du sommeil :

  • La lumière émise par les écrans, la lumière bleue est particulièrement incriminée même si cela reste contesté, inhibe la sécrétion de mélatonine, l’hormone du sommeil. Cela perturbe l’horloge biologique et retarde l’endormissement.
  • Regarder des vidéos, lire ou envoyer des messages, sollicite le cerveau et le maintient en éveil. Cela peut provoquer de plus anxiété et ruminations.
  • Le cerveau associe le lit à une activité éveillée et ne reconnaît plus la chambre comme un espace de repos.
  • Les notifications peuvent réveiller l’adolescent, certains programment des réveils, de peur de rater des informations.

Comment changer leurs (mauvaises) habitudes

D’abord on tente une approche pédagogique globale sur le sommeil. Meryam Ennouamane Jouali, professeure en lycée professionnel, le dit et le répète : “Dormir n’est pas perdre du temps. C’est reprendre le pouvoir.” Pour convaincre un ado de lâcher son téléphone, rien de tel en effet que de lui rappeler que dormir améliore la peau, booste les performances sportives, régule le poids… et, cerise sur le gâteau, favorise de meilleures notes.

On passe ensuite à l’accompagnement pratique en quatre points : 

  • Désactiver les notifications après 20h : mode avion ou « Ne pas déranger » pour couper les sollicitations qui relanceraient l’attention.
  • Instaurer un couvre-écran : couper tout écran au moins 1 heure avant le coucher (idéalement 90 minutes). On peut se faire aider par une alarme "off téléphone".
  • Créer une routine de déconnexion : remplacer l’écran par une activité calme : lecture papier, méditation, étirements...
  • Tenir le téléphone hors de la chambre : le charger dans une autre pièce et utiliser un réveil analogique pour éviter la tentation.

Et n’oublions pas : les enfants apprennent par mimétisme. Alors, montrons l’exemple en rangeant nos téléphones. Puis on se motive en adoptant des routines bien-être et en organisant un environnement favorable au sommeil (frais, calme, sombre). Cela peut également passer par le jeu, en se lançant des défis pour établir de nouvelles habitudes ensemble. On sort le pyjama, on se détend, et on profite de ce temps précieux pour soi !

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