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Mettre son téléphone en mode silencieux dans les espaces publics est une question de politesse. Chez les personnes qui fuient les appels téléphoniques, ce mode pourrait bien être activé en permanence. Ces derniers privilégient l’écoute de messages vocaux, auxquelles ils peuvent répondre dans la foulée, à l’oral ou à l’écrit. Nicolas, la quarantaine, téléphone souvent vissé à la main, pourrait faire partie de ceux-là. Depuis quelque temps, il a en effet un peu délaissé l’usage purement téléphonique de son smartphone et “préfère utiliser les notes vocales ou les messages textes pour que cela ne soit pas trop accaparant et permettre à mon interlocuteur de répondre au moment où il sera plus disponible”. Clément, la trentaine, qui gère beaucoup de monde au boulot, procède quelque peu différemment. Lui, dispose d’usages distincts de son téléphone quand il s’agit de sa vie pro ou perso. “Avec mes proches, je vais opter pour les sms, les vocaux et j’utilise beaucoup WhatsApp mais avec mes relations professionnelles, je passe encore beaucoup d’appels même si de plus en plus d’échanges se font via WhatsApp”. Ces nouveaux usages permettent en effet, selon lui, “de pouvoir laisser une trace écrite des instructions données et d’être plus efficace en allant droit au but sans s’encombrer de toutes les fioritures ou formules de politesses propres aux appels”.
Un manque de temps et d’espace
Même son de cloche pour Amandine, la trentaine. Cette Parisienne dynamique qui vit à mille à l’heure a totalement renoncé, il y a plusieurs années déjà, aux appels téléphoniques. Ses modes de communication favoris se résument aujourd’hui aux messages textes voire, depuis peu, aux notes vocales. “Au quotidien, on n’a plus le temps de passer un appel tranquillement aussi bien vis-à-vis du temps dont on dispose que du lieu où on se trouve alors se laisser des messages textes ou vocaux permet de pouvoir délivrer rapidement une information ou d’avoir un rapide échange sur un sujet en particulier”, commente-t-elle. Amandine a néanmoins mis longtemps à passer aux notes vocales. “Au début, je n’en voyais pas trop l’intérêt mais j’ai réalisé que certaines personnes n’étaient pas forcément à l’aise à l’écrit donc la note vocale leur convenait mieux. Et si on ne fait pas ça dans un espace public en haut-parleur et discrètement, ça permet de communiquer sans déranger son voisinage”.
Nos téléphones et nos assistants vocaux nous écoutent-ils vraiment ?
Mais alors d’où proviennent ces nouvelles utilisations de nos smartphones et pourquoi est-on aujourd’hui autant réfractaire à son usage premier, à savoir téléphoner ? Qui est particulièrement concerné ? Le démarchage téléphonique a certainement sa part de responsabilité mais selon Catherine Lejealle, sociologue et chercheuse à l’ISC Paris, il s’agit surtout d’une question de personnalité. L’appel téléphonique place les personnes timides dans une position vulnérable car elles n’ont pas eu le temps de se préparer à cet échange et donc de construire une réflexion aboutie. Ce malaise touche particulièrement la jeune génération, précise la sociologue sur le site de 20 Minutes : “C’est un cycle de construction identitaire, on a souvent du mal à aligner ses idées, à être pertinent sur l’instant. On n’a pas forcément l’habitude de s’exprimer en public, par exemple.”
Choc générationnel : des "jeunes" viennent de m'expliquer que contacter qq par téléphone est "malpoli" alors qu'il existe tant de messageries, et que téléphoner oblige à répondre tout de suite, ce qui serait "peu sociable" 🤨 pic.twitter.com/PbuWznbQbc
— F. Pozzoli-Montenay 🖋 (@FPM_Paris) January 9, 2023
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Pas besoin d’être un Italien pour parler avec ses mains. Le langage corporel est largement responsable dans notre manière de nous exprimer : “environ 70 % de notre communication est non verbale”, précise la sociologue. Logique, donc, que nous perdions notre équilibre lorsque notre béquille tombe. “Ce n’est pas si évident de faire sans la vision de la personne en face, quand on manque d’assurance, le partenaire est un point d’appui, on transmet ses émotions par le regard, le corps, et l’autre peut rebondir. Par téléphone, c’est très difficile.” conclut-elle. Cette phobie du coup de fil sonne-t-elle la fin de la spontanéité ? Vous avez toujours la possibilité de ponctuer vos conversations avec des émojis pour transmettre vos émotions. Encore faut-il savoir maîtriser leur utilisation pour éviter les mauvaises interprétations.