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Porté par le pessimisme ambiant, vous avez voulu fuir la capitale. Vous n’avez pas pu décaler vos vacances ou vous n’avez tout simplement pas obtenu de ticket pour suivre vos épreuves préférées… En tout cas, vous ne vous attendiez pas à ce que les dernières compétitions sportives connaissent un tel succès et les scènes de liesse qui tournent en boucle à la télé vous font regretter de ne pas en être. Si Paris fait la fête en votre absence, nous sommes là pour vous consoler. Le numérique s’impose désormais comme un allié du spectacle sportif, c'est en tout cas l’hypothèse formulée par des chercheurs dans les colonnes du magazine Usbek & Rica.
Le “supporter augmenté”
Du spectateur passablement engagé au commentateur endiablé, il n’y a qu’un écran. Selon David Roizen, membre de l’Observatoire du sport de la Fondation Jean-Jaurès, l’usage du smartphone dans un contexte de compétition sportive permet au spectateur d’avoir un rôle plus interactif. “Il s’agit en quelque sorte de ne plus se contenter de subir des faits de jeu qui lui échappent”, précise Usbek & Rica. Regarder un match en replay permet de mieux saisir la précision des passes au ralenti, explique David Roizen. Sur les réseaux sociaux, la diffusion d’actions décisives imperceptibles depuis les premiers gradins permet également, commentaires à l’appui, de mieux comprendre (et pourquoi pas contester) la décision de l’arbitre. “Le fan veut commenter, partager, échanger sur ce qu’il voit, que ce soit sur un fil de discussion Twitch, un forum de supporters, les réseaux sociaux ou un groupe WhatsApp”, illustre Boris Helleu, maître de conférences à l’université Caen Normandie et spécialiste du marketing sportif. C’est la naissance de ce qu’Usbek & Rica qualifie de “supporter augmenté”.
La multiplication des canaux de diffusion (télévision, réseaux sociaux, plateformes de live streaming) propose désormais un contenu ultra-personnalisé “qui promet de révolutionner l’expérience du spectateur soudain promu réalisateur de l'événement sportif auquel il assiste”, analyse Usbek & Rica. Depuis quelques années, la Fédération internationale automobile (FIA) a fait de chaque course un véritable spectacle télévisé, avec une immersion de plus en plus folle grâce aux caméras embarquées. “Il est désormais possible de suivre l’ensemble de la course de manière classique ou bien depuis le véhicule d’un seul pilote, comme si vous étiez embarqué à bord”, note l’expert de la Fondation Jean-Jaurès.
Les jauges limitées dans les stades, le coût du billet et du déplacement sont autant d'arguments pour privilégier le confort de son canapé. “Le stade, ce ne sont pas seulement 80 ou 90 minutes de match, mais 4 heures d’investissement en moyenne pour un supporter à domicile entre les trajets, les animations, l’installation…”, développe Boris Helleu. Si la pollution numérique est un sujet incontestable, le déplacement des spectateurs n’est pas sans impact sur l’environnement.
Bénéfice cognitif
Et au niveau du cerveau, ça donne quoi ? “On pense que lorsqu'on regarde du sport on ne fait rien, mais en réalité notre cerveau fait beaucoup de choses !” déclarait récemment à Ouest France Sylvie Chokron, neuropsychologue et directrice de recherches au CNRS. Dans son ouvrage intitulé Dans le cerveau de… (éd. Presse de la Cité), elle explique que regarder un sport active notre cerveau comme si nous faisions l'exercice nous-mêmes. Cette “empathie sportive” active les neurones responsables de la motricité et de la coordination, les “neurones miroirs”. Par exemple, voir un athlète exécuter un mouvement complexe active les mêmes zones de notre cerveau que si nous faisions ce mouvement nous-mêmes. Visualiser un geste avant de le reproduire — l’imagerie mentale — est pour la spécialiste “la base de la conceptualisation de l’abstraction” : apprendre en imaginant. Ce procédé fait désormais partie intégrante de la préparation mentale des athlètes, comme on peut le voir dans cette vidéo.
C’est le moment de faire chauffer vos neurones !