Les pieds dans le sable, la tête au sommet des Alpes ou au fin fond d’une maison de campagne… Quand l’heure des vacances a sonné, difficile de ne pas partager son bonheur sur Facebook, Instagram ou TikTok. Au mieux, vous risquez de faire des jaloux chez vos collègues de travail, au pire vous faites un cadeau insoupçonné aux cambrioleurs…
Chaque année, le Ministère de l’intérieur dévoile ses chiffres côté cambriolages. Alors que l’on aurait pu croire que la pandémie mondiale avait aussi contraint les malfrats à rester chez eux, les statistiques nous révèlent une chose surprenante. En 2020, lors des quelques ouvertures de vannes, aka les multiples déconfinements, les Français n’ont pas hésité une seule seconde à faire leurs valises face à un appel du large trop grand. Résultat de ces échappées soudaines, une augmentation de 114 % de ce type de délit. Et une partie de cette augmentation pourrait bien s’expliquer par le nombre de données géolocalisées que nous laissons sur les réseaux !
Gentleman stalker
Avec 3,81 milliards d’utilisateurs sur les réseaux sociaux, c’est presque la moitié de la population mondiale qui échange, partage et like des contenus sur ces plateformes en 2020. Le capitaine Cassel, Commandant de la BDRIJ (Brigade Départementale de Renseignement et d’Investigation Judiciaire) de Nîmes rappelle que « les délinquants sont tous sur les réseaux sociaux » et qu’ils n’hésitent pas à se servir de cette technologie pour leurs vilaines activités. Pour le capitaine David Cassel : « C’est difficile d’avoir des chiffres précis sur le nombre de cambriolages causés par les réseaux sociaux ». Mais l’enquêteur ajoute tout de même : « Les réseaux sociaux deviennent une vraie piste lorsque la maison est manifestement inoccupée ».
Une intuition que corrobore une étude menée par Credit Sesame, un service financier américain, selon laquelle 78 % des cambrioleurs assurent avoir utilisé et espionné leurs victimes sur les réseaux sociaux avant de passer à l’acte. Alors que certains cambrioleurs jouent sur les « anciennes » méthodes en supervisant leur délit sur Google street view, beaucoup n’hésitent pas à utiliser désormais Facebook et Twitter.
La géolocalisation, le nerf du problème
Comment font-ils leurs repérages ? « Très peu d’individus possèdent des compétences informatiques pour travailler avec des algorithmes. Ce sont des amis d’amis ou des utilisateurs qui rôdent sur les profils publics », explique le capitaine de la Gendarmerie. Bien loin de l’image du cyber-criminel, le « travail » de reconnaissances des cambrioleurs s’apparentent à du stalking, plus qu’à une vraie opération informatique. Les voleurs repèrent certaines données essentielles comme le statut en ligne, le lieu de vos posts et de vos photos. En quelques clics, ils devinent rapidement si vous êtes ou non chez vous. Une mésaventure qui est arrivée à un fan inconditionnel de baskets dont la collection personnelle entreposée chez lui valait plusieurs milliers d’euros. Les enquêteurs chargés de l’affaire ont rapidement compris que les cambrioleurs avaient repéré l’heure de footing du collectionneur grâce à la photo quotidienne postée de sa course sur Instagram. Pas bête la guêpe !
La technologie, côté service de l’ordre
Outre l’opération “tranquillité vacances”, qui permet de faire surveiller son domicile par les gendarmes pendant les vacances, la police utilise depuis 2018 une intelligence artificielle dans la lutte contre les cambriolages. L’application informatique, grâce aux données des précédents cambriolages, prédit des zones « chaudes » (où le risque est le plus élevé) et « froides ». L’algorithme permet aux gendarmes de visualiser et d’organiser des patrouilles en fonction donc de la « chaleur » de la zone. « C’est une aide précieuse, confirme le Capitaine Cassel, on détecte les phénomènes, on est plus réactif et plus offensif pour intervenir ».
Plus généralement, le travail de la brigade d’enquêteurs en technologie consiste à analyser les données du Web et des réseaux sociaux, les regrouper et les recouper pour servir l’investigation.