Sur les réseaux sociaux, et surtout depuis le confinement, les contenus liés à la maternité se sont multipliés. Partages d’expériences, de conseils, de vécus… Internet a libéré la parole, créé de nouvelles pressions et dessiné de nouvelles façons d’être mère. On vous explique.
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1. Sur instagram, des nombreux comptes pour aider les mamans
« La matrescence », c’est le phénomène physique et psychologique par lequel une femme devient mère. Sur le podcast du même nom, ou encore sur Bliss, des mères partagent à d’autres parents leur récit de maternité.
Quand je suis devenue mère, ça a été un vrai tsunami dans ma vie. J’étais heureuse et en même temps complètement perdue. Je ne m’attendais pas à ce que ce soit si dur, autour de moi tout le monde me disait « C’est que du bonheur ». Ecouter ces podcasts et suivre leurs pages m’a beaucoup aidé : en écoutant leurs histoires, pleines de vérité, je ne me sentais plus seule.
Elise, maman d’Anatole, 2 ans
Au-delà de ces récits, plusieurs comptes sont dédiées à la parentalité. Des experts diplômés y donnent gratuitement des conseils et astuces aux jeunes parents pour les soutenir. Parmi eux : @charline.sagefemme, @cathy.losteo, @ergomums, @allaitons_timoun, @littlebunbao ou encore @fee_de_beau_reves.
Ces comptes m’ont été d’un énorme secours quand je suis devenue maman ! C’était en plein confinement, ma famille était loin, grand nombre de spécialistes étaient fermés. Ma fille hurlait non stop et en regardant une vidéo sur Instagram, j’ai compris qu’elle souffrait de RGO (un médecin me l’a confirmé). Toujours sur Instagram, j’ai pu trouver énormément de conseils pour nous aider : des massages à faire à ma fille, des techniques pour l’aider à s’endormir, des astuces pour lui donner envie de manger (la diversification a été compliquée…).
Lucie, maman de Nina, 2 ans
Si ces comptes sont adressés aux parents des deux sexes, il suffit de consulter leurs abonnés pour se rendre compte que ce sont les mères qui les suivent et vont y chercher l’information :
J’ai plein de copines qui sont mamans et parmi leurs compagnons, aucun n’a jamais cherché une solution à un problème sur Internet (ni auprès des médecins, c’est souvent nous qui prenons les rdv). Et pourtant, ils sont bien contents quand on trouve des solutions. Ça rajoute à la charge mentale, déjà grande.
Lucie
2. Quand trop d’informations peut mettre la pression…
Sur Instagram, parmi les comptes les plus suivis, il y a ceux de mamans qui partagent leur façon d’être mères, à travers la parentalité positive, une éducation qui se veut être la plus bienveillante possible pour les enfants. Au programme : allaitement, portage, bain libre, activités Montessori, beaucoup de pédagogie …
J’ai découvert ça dans des livres pendant ma grossesse et ça a été la révélation ! Je viens d’une famille très autoritaire, pas vraiment affectueuse ou à l’écoute. Je me suis donc mis à suivre plein de comptes sur ça, je voulais être ce genre de maman pour mon enfant ! Sauf que rapidement, ça a commencé à me mettre la pression et à m’angoisser. Il ne fallait surtout pas que je crie, que je pèse chaque mot… Mon allaitement a été un désastre, je suis passée au biberon et à cause de certains comptes, j’en ai culpabilisé. J’avais l’impression que le moindre « faux-pas » allait traumatiser mon enfant !
Clémence, maman de Malo, 3 ans
Quand Malo avait 8 mois, elle a donc fait du tri sans les comptes qu’elle suivait et a commencé à suivre son instinct, gagnant en confiance et en sérénité.
Ces comptes sont utiles, ils donnent de bonnes infos mais il ne faut pas croire que ce sont des règles à appliquer tout le temps. Sinon, ça serait tout sauf bienveillant envers les parents. Les parents parfaits, ça n’existe pas ! Aujourd’hui, je les regarde quand j’ai besoin de conseils sur un sujet précis… mais je sais d’avance que je ne les appliquerai pas à la lettre… car je suis humaine. Et c’est déjà très bien !
Clémence
3. La mère parfaite… et sa déconstruction
Au-delà de l’idéal de mère parfaite avec son enfant, il y a aussi l’image de la femme parfaite tout court. Sur Instagram, on le sait, on a tendance à montrer les bons côtés de nos vies et à vouloir se mettre en valeur. Ce phénomène n’échappe pas à la maternité…
Il y a des comptes où les nanas viennent d’accoucher, elles ont déjà retrouvé leur ligne, ont un brushing parfait, sortent au resto, ont un business à elles… Au début, ça m’a complètement fait déprimer. Moi j’étais en pyjama toute la journée, je ne sortais pas à cause des RGO de ma fille qui hurlait tout le temps, je ne dormais pas… J’ai commencé à aller mieux en arrêtant de suivre ces comptes.
Lucie
De l’autre côté, il y a les comptes qui déconstruisent cette idée de la « mère parfaite », censée tout gérer : le boulot, la bienveillance H24, le couple, leur corps, voyager, sortir…
Parmi eux : des comptes de jeunes mamans qui partagent leurs galères, parfois avec beaucoup d’humour, et les comptes humoristiques comme @parentepuise, @sacree_maman, @maman.memes, @boobzfr_.
4. Montrer la réalité pour lever le tabou du post-partum
En février 2020, en réaction à la censure d’une publicité d’un produit post-accouchement à la TV américaine durant les Oscars, la sociologue française et féministe Illana Weizman et ses amies Ayla Saura, Morgane Koresh et Masha Sacré ont lancé le hashtag #monpostpartum.
Objectif ? Montrer la réalité parfois dure de cette période, restée tabou pendant des années, à travers des photos parfois crues mais bien réelles : des femmes en couches post-accouchement, des cicatrices douloureuses de césariennes, des vergetures, des cernes sur un visage qui n’a que peu dormi, des témoignages de mamans…
J’ai découvert ce mouvement avant même d’avoir mon premier enfant et bizarrement, ça m’a énormément rassurée. Jusqu’alors, personne ne parlait du post-partum et grâce à ce mouvement, et aux livres qui en ont suivi, j’ai pu m’y préparer, que ce soit psychologiquement ou de façon pratique (en me préparant des plats à l’avance pour les premières semaines, par exemple). Et surtout : je n’ai pas découvert cette réalité avec effroi après l’accouchement, comme certaines de mes copines à qui ça a fichu un sacré coup… Et puis…quand on a accouché, ça fait du bien aussi de voir qu’on n’est pas la seule à être dans le dur !
Emma, maman de Lou, 1 an
Autre réalité qui fut tabou pendant des années : le baby-blues et la dépression post-partum. Plusieurs comptes comme @mal_de_meres ou @association.maman.blues partagent des témoignages et des conseils pour aider ces mères à traverser cette période et à se faire accompagner par des spécialistes bienveillants.
5. La sororité entre mamans
Au-delà de la pression, de déchirements entre plusieurs « courants » de parentalité sur les réseaux, Instagram, et les réseaux sociaux, c’est aussi des espaces de grande solidarité entre mères. Dans des groupes privés sur la maternité, sur des maladies rares, des mères se donnent leurs astuces, partagent leurs expériences…
Sur le groupe Facebook « Mamans Nantaises, conseils, témoignages et bonnes adresses », les mères se partagent des recommandations de pédiatres, de parcs où aller l’été, de maternités…
Instagram a été ma bouée de sauvetage pendant le confinement. J’y ai rencontré un tas de mamans qui ont accouché dans la même période que moi et on a même créé un groupe WhatsApp, où on papote quasi tous les jours, pour se plaindre, pour rire, pour poser des questions, se souhaiter les anniversaires. Ce sont de vraies amies très chères à mes yeux depuis maintenant deux ans, même si bizarrement, on ne s’est jamais vues pour la plupart.
Lucie
6. Et les papas ?
Heureusement, les pères aussi commencent à s’emparer des réseaux sociaux pour trouver du soutien, des conseils, partager eux aussi leur expérience de parentalité. Parmi les comptes destinés aux pères (et aux mères) : @papatiarcat, @papachouch, @papa.plume. Plusieurs podcasts se lancent également pour parler de patrescence, comme @papavelours et @histoiresdedarons.
Florian, le mari de Lucie et papa de Nina, se rend compte aujourd’hui avoir lui-même traversé une patrescence difficile. Pour lui, lire ces comptes et témoignages de pères lui auraient fait du bien s’il en avait eu connaissance à l’époque.
Je n’ai absolument pas le réflexe d’aller sur Internet ou les réseaux pour trouver des solutions… par contre j’y vais souvent pour trouver des raisons de m’angoisser encore plus quand ma fille est malade en allant sur Doctissimo (rires). Heureusement que ma femme a fait toutes ces recherches, qui nous ont beaucoup aidé durant ces débuts de vie de parents un peu chaotiques en plein Covid… Cette semaine, Lucie m’a partagé un post sur la charge mentale. Je pense qu’il faut que je travaille un peu dessus (rire gêné)
Florian
Une histoire d’ @emma_clit à retrouver sur sa page.